Actu-tendance n° 771
DROIT DU TRAVAIL
Jurisprudence – Relations individuelles
Rappel : La période d’essai permet à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d’apprécier si les fonctions occupées lui conviennent (L1221-20 du Code du travail). La période d’essai ne doit toutefois pas être détournée de sa finalité première et utilisée par l’employeur pour se soustraire aux dispositions protectrices des salariés, notamment en matière de licenciement. Par définition, la période d’essai n’a plus de raison d’être si le salarié a déjà eu l’occasion d’exercer dans l’entreprise les fonctions pour lesquelles il est engagé.
L’employeur peut-il prévoir une période d’essai quand il embauche un salarié qui travaillait auparavant pour lui sous le statut d’auto-entrepreneur ?
Cass. Soc., 29 avril 2025, n°23-22.389
Dans cette affaire, une agente commerciale a collaboré pendant 9 mois avec une société sous le statut d’auto-entrepreneur.
A compter du 1er septembre 2020, elle a été engagée en qualité d’agenceuse-vendeuse dans le cadre d’un contrat de travail prévoyant une période d’essai de deux mois. Celle-ci n’ayant pas été concluante, l’employeur y mettait fin en date du 13 octobre 2020 dans le délai contractuellement prévu.
La salariée a saisi la juridiction prud’hommale notamment d’une demande en nullité de la période d’essai et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Bien qu’ayant consenti à la période d’essai au moment de la signature du contrat de travail, elle estimait que celle-ci n’était pas justifiée dès lors que l’employeur avait été en mesure d’apprécier les qualités professionnelles du salarié avant sa conclusion.
La Cour d’appel de Pau déboute la salariée de ses demandes estimant la période d’essai parfaitement justifiée dès lors que la salariée n’était pas liée précédemment par un contrat de travail à la société de sorte que l’employeur n’avait pas pu déjà apprécier ses capacités professionnelles dans ce cadre-là.
La Cour de cassation censure le raisonnement de la Cour d’appel et renvoie l’affaire devant la Cour d’appel de Toulouse pour être rejugée sur ce point.
- La Cour de cassation reproche à la Cour d’appel de Pau de ne pas avoir recherché si l’employeur n’avait pas déjà eu l’occasion d’apprécier les aptitudes professionnelles de la salariée lors de sa précédente relation de travail, quelle que soit sa forme.
- Cette décision s’inscrit dans la droite ligne de la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation selon laquelle si un employeur a eu l’occasion d’apprécier les aptitudes professionnelles d’un salarié lors d’une précédente relation de travail, il ne peut pas lui imposer une période d’essai. En effet, la Haute juridiction s’était déjà prononcée en ce sens dans une affaire concernant un agent commercial qui après avoir collaboré avec une société pendant 7 ans en tant que travailleur indépendant, avait était embauché par cette même société pour exercer des fonctions identiques en tant que VRP. (Cass. Soc., 21 janvier 2015, n°13-21.875)
Note : Pour autant, cette décision n’interdit pas, par principe, la licéité d’une période d’essai conclue après l’exercice d’une prestation de travail sous statut auto-entrepreneur.
Il conviendra d’analyser, au cas par cas, les conditions de licéité de celle-ci.
Rappel : L’astreinte est définie comme étant « une période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, doit être en mesure d’intervenir pour accomplir un travail au service de l’entreprise ». (C.trav., art., L3121-9)
La période d’astreinte ne constitue pas, en principe, du temps de travail effectif. Elle doit néanmoins faire l’objet d’une contrepartie sous forme financière ou de repos. (C.trav., art., L3121-9)
Etant précisé que, seule la durée de l’intervention pendant l’astreinte (laquelle comprend également le temps de trajet) est considérée comme du temps de travail effectif et doit être rémunérée comme tel.
En revanche, si le salarié demeure « à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles. », la période d’astreinte peut être requalifiée en temps de travail effectif. (C.trav., art., L3121-1)
L’astreinte peut-elle constituer du temps de travail effectif en raison de l’intensité des contraintes imposées au salarié ?
Cass. soc., 14 mai 2025, n° 24-14.319, publié
Dans cette affaire, un salarié exerçant les fonctions d’employé polyvalent devait assurer quatre nuits d’astreinte par semaine, du vendredi soir au mardi matin, au sein de l’hôtel où il travaillait et logeait dans une chambre de fonction réservée à cet effet. Celui-ci a été licencié le 2 décembre 2019.
A la suite de son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud’hommale notamment de demandes en paiement d’heures supplémentaires accomplies au titre des astreintes réalisées.
La Cour d’appel lui donnait partiellement raison et limitait l’indemnisation au motif que :
- Le salarié ne rapportait pas la preuve que l’intégralité de ses temps d’astreinte constituait du temps de travail effectif. Elle relevait notamment l’existence d’une borne d’accès 24 heures sur 24 permettant aux clients d’avoir un accès libre à l’hôtel sans avoir à s’adresser au salarié de permanence, ce qui limitait ses interventions durant les nuits passées à l’hôtel.
- La Cour constatait néanmoins que le salarié était régulièrement appelé à intervenir durant ses périodes d’astreinte, compte tenu de la vétusté des lieux et du matériel de l’hôtel.
Le salarié s’est pourvu en cassation en soutenant que son numéro de téléphone figurait sur la borne automatique de l’hôtel, multipliant ainsi ses interventions au cours de la période d’astreinte.
Le juge doit vérifier l’intensité des contraintes imposées au salarié pendant l’astreinte.
Par décision du 14 mai 2025 publiée au bulletin, la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel et renvoie l’affaire devant la Cour d’appel de Bordeaux.
Elle reproche aux juges du fond de ne pas avoir vérifié « si le salarié avait été soumis, au cours de ses périodes d’astreinte, à des contraintes d’une intensité telle qu’elles avaient affecté, objectivement et très significativement, sa faculté de gérer librement le temps pendant lequel ses services professionnels n’étaient pas sollicités et de vaquer à des occupations personnelles ».
Ces derniers ne pouvaient se contenter de constater l’existence d’une borne d’accès 24 heures sur 24 au sein de l’hôtel pour écarter la qualification de temps de travail effectif.
Il appartiendra à la Cour d’appel de Bordeaux de se prononcer sur la question.
Apports de l’arrêt
- La Cour de cassation insiste sur la nécessité pour les juges de procéder à une analyse in concreto des sujétions imposées au salarié pendant la période d’astreinte.
- Le critère d’ « intensité » est ici mis en avant par la Haute juridiction pour déterminer si les contraintes imposées au salarié sont telles qu’elles affectent objectivement et très significativement sa faculté de gérer librement son temps personnel.
Rappel : Une donnée personnelle est définie comme étant « toute information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable ». (Règl. (UE) n° 2016/679, 27 avr. 2016, art. 4, 1º). Une personne physique peut être identifiée directement (nom, prénom) ou indirectement (numéro de téléphone, matricule, numéro de sécurité sociale etc.)
A chaque traitement de données à caractère personnel doit être assignée une finalité qui doit être légale et légitime.
Le consentement constitue l’une des six bases légales prévues par le RGPD qui autorisent la mise en œuvre de traitements de données à caractère personnel.
Cass. Soc., 9 avril 2025, n°23-13.159
Dans cette affaire, un salarié embauché en qualité de Chef d’agence dans une société de construction de maisons individuelles est licencié pour faute grave après avoir supprimé plus de 4000 fichiers et transféré une centaine de courriels, avec pièces jointes, sur sa boîte mail personnelle. Etant précisé que, ces suppressions et transferts sont intervenus la veille du jour où le salarié a demandé une rupture conventionnelle à la Société.
Alertée par certains collaborateurs de la disparition massive de fichiers de l’agence, la Société a mené une enquête afin d’identifier l’origine de ces effacements. Les agissements du salarié sont alors constatés par un huissier de justice dans un procès-verbal qui sera produit aux débats.
La question posée à la Cour de Cassation est celle de la licéité du procès-verbal d’huissier et du traitement du fichier de journalisation (ie : enregistrement dans des « fichier journaux » ou « logs » de l’activité des utilisateurs pour assurer la sécurité et la traçabilité des opérations).
Le salarié a saisi la juridiction prud’hommale en contestation de son licenciement, estimant que le constat d’huissier constitue un mode de preuve illicite dès lors qu’il a été établi en violation des dispositions du RGPD. Il soutient en effet que le contrôle de traçabilité informatique utilisé par l’huissier est irrégulier car l’employeur ne démontre pas :
- l’avoir déclaré à la CNIL (l’adresse IP étant une donnée à caractère personnelle)
- ni avoir consulté le CSE ou les instances représentatives du personnel
- ni avoir informé les salariés de la mise en place de ce système de contrôle (article L1221-1 et s. du Code du travail)
La Société, quant à elle, considère que ce procédé est parfaitement licite et recevable dans la mesure où :
- aucun outil de contrôle du contenu des messages ou sites personnels des salariés n’a été mis en place par l’employeur.
- seules des recherches ont été menées sur les fichiers de journalisation dans le but d’identifier les manipulations effectuées par le salarié dans la messagerie interne à l’entreprise. Or, ces fichiers ne contiennent aucune donnée personnelle et, par conséquent, ne nécessitent aucune information à la CNIL.
La Cour d’appel rejette l’argumentaire du salarié et juge que le constat d’huissier constitue une preuve licite. Elle considère en effet que l’adresse IP en question :
- ne contenait aucune donnée personnelle ;
- n’était pas attribuée par un fournisseur d’accès à internet ;
- correspondait à une adresse de réseau local ;
- n’identifie que des ordinateurs dans le réseau et non une personne physique en particulier de sorte qu’aucune déclaration à la CNIL n’était requise.
Par décision du 9 avril 2025, la Cour de cassation censure le raisonnement de la Cour d’appel au visa des articles 4, 5 et 6 du RGPD et rappelle que :
- Selon l’article 5 du RGPD, les données à caractère personnel doivent être traitées de manière licite, loyale et transparente au regard de la personne concernée et collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes, et ne pas être traitées ultérieurement d’une manière incompatible avec ces finalités.
- Selon l’article 6 § 1, le traitement n’est licite que si, et dans la mesure où, au moins une des conditions suivantes est remplie, notamment si « la personne concernée a consenti au traitement de ses données à caractère personnel pour une ou plusieurs finalités spécifiques ».
La Cour de cassation en déduit de manière limpide que : « les adresses IP, qui permettent d’identifier indirectement une personne physique, sont des données à caractère personnel, au sens de l’article 4 du RGPD, de sorte que leur collecte par l’exploitation du fichier de journalisation constitue un traitement de données à caractère personnel qui n’est licite que si la personne concernée y a consenti. »
Or, au cas particulier, la Cour cassation a relevé que :
- L’exploitation des fichiers de journalisation, qui avaient permis d’identifier indirectement le salarié, constituait un traitement de données à caractère personnel au sens de l’article 4 du RGPD.
- L’employeur avait traité, sans le consentement de l’intéressé, ces données à une autre fin, à savoir le contrôle individuel de son activité, que celle pour laquelle elles avaient été collectées.
Il en résulte, pour la Cour de cassation, que le constat d’huissier constituait une preuve illicite.
Note :
- Cette solution n’est pas sans rappeler une jurisprudence antérieure de la Cour de cassation qui avait déjà statué en ce sens et considéré qu’une adresse IP est une donnée à caractère personnel (Cass. Soc., 25 novembre 2020, n°17-19.524).
- Le raisonnement adopté par la Cour de cassation dans la décision commentée est critiquable puisque le consentement n’est pas l’unique base légale autorisant la mise en œuvre d’un traitement de données à caractère personnel. En effet, il en existe six qui pourraient être mobilisés par les employeurs. Pourtant, la Cour de cassation semble ici ériger le consentement comme une condition exclusive de licéité. Selon nous, l’intérêt légitime de l’employeur (article 6§1 du RGPD) aurait également pu être invoqué par la Société comme fondement légal du traitement.
- L’employeur n’est pas complètement démuni face à une telle solution. La preuve illicite n’est pas systématiquement déclarée irrecevable par les juges. En effet, le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte au principe d’égalité des armes à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi. (Cass. Soc., 19 mars 2025, n°23-19.154)
Cette décision pose donc la question de la conciliation entre, le droit à la protection des données personnelles, d’une part et, le droit à la preuve, d’autre part.
Jurisprudence – Relations collectives
La Cour de cassation est amenée à se prononcer sur les contours de la notion de « projet important » en matière d’expertise sollicitée par le CSE.
Rappel :
Aux termes de l’article L2315-94, 2° du Code du travail, le CSE peut faire appel à un expert habilité notamment « en cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, prévus au 4° du II de l’article L. 2312-8 »
En cas de contestation de la délibération du CSE votant l’expertise, il incombe au comité de démontrer l’existence d’un « projet important » (Cass. soc., 20 mars 2024, n° 22-20.476 : solution rendue à propos d’un CHSCT, mais transposable au CSE)
La notion de « projet important » n’est pas définie par le Code du travail. Néanmoins, l’administration a précisé qu’un projet est important « lorsque la modification des conditions de travail envisagée concerne un nombre significatif de salariés et conduit, sur le plan qualitatif, à un changement déterminant des conditions de travail des salariés concernés ». (Circ. DRT 93-15, 25 mars 1993 : BO min. Trav., n° 93/10, 5 juin).
Cass. Soc., 6 mai 2025, n°24-11.167
Dans cette affaire, 24 salariés d’une société devaient être transférés à une autre société du groupe sans toutefois que ce transfert n’emporte de modification du lieu de travail des salariés concernés ni de modification dans l’organisation du travail de l’équipe.
Par une délibération du 4 octobre 2023, le CSE a voté le recours à un expert habilité sur le fondement de l’article L2315-94, 2° du Code du travail.
L’employeur a assigné le CSE ainsi que l’expert selon la procédure accélérée au fond devant le président du Tribunal Judiciaire de Paris en contestation de la nécessité de l’expertise, et subsidiairement, de son étendue et son coût prévisionnel.
Le transfert de 24 salariés entre deux sociétés d’un même groupe constitue-t-il un « projet important » au sens de l’article L.2315-94, 2° du Code du travail, justifiant le recours à une expertise ?
Pour accorder l’expertise, le Tribunal judiciaire de Paris a considéré que bien que la réorganisation envisagée n’emporte pas de modification du lieu de travail et de modification de l’organisation du travail de l’équipe, un changement d’employeur comporte nécessairement « en germe » une modification des conditions de travail.
La Cour de cassation censure l’analyse du Tribunal judiciaire de Paris en lui reprochant d’avoir retenu des « motifs impropres à caractériser au jour de la délibération le droit du CSE de recourir à un expert ».
Elle déclare expressément qu’ « il n’y a pas un droit général à l’expertise, laquelle ne peut être décidée que lorsque les conditions visées à l’article L.2315-94 du Code du travail sont réunies »
La Cour de cassation en a donc conclut que dès lors que le projet de transferts n’emportait pas de modification des conditions de santé et sécurité ni des conditions de travail à la date de la délibération ayant voté le recours à un expert, celui-ci ne pouvait être qualifié de projet important au sens de l’article L.2315-94 2° du Code du travail.
Que faut-il en retenir ?
En l’absence de modification des conditions de santé et sécurité ou des conditions de travail à la date de la délibération litigieuse, le CSE ne peut revendiquer le droit de recourir à un expert.
La solution commentée fait également écho à une décision rendue par la Cour de cassation en 2010 à l’occasion de laquelle elle précisait déjà que le nombre de salariés concernés par le projet ne détermine pas à lui seul l’importance du projet (Cass. soc., 10 févr. 2010, n° 08-15.086).
Autrement dit, le critère quantitatif – à lui seul – ne suffit pas à légitimer le recours à l’expertise. Le projet doit introduire un changement définitif dans l’organisation et avoir des répercussions sur les conditions de santé, sécurité ou de travail des salariés pour donner lieu à une expertise. (Cass. soc., 8 févr. 2012, n° 10-20.376 ; Cass. soc. 12 avr. 2018, n° 16-27.866)
Législation et réglementation
L’article 16 de la loi n°2025-391 « DDADUE » du 30 avril 2025 instaure une nouvelle procédure d’action de groupe en droit français à l’occasion de la transposition de la directive (UE) 2020/1828 du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives.
L’action de groupe est définie comme étant une action « exercée en justice par un demandeur pour le compte de plusieurs personnes physiques ou morales, placées dans une situation similaire, résultant d’un même manquement ou d’un manquement de même nature à ses obligations légales ou contractuelles commis par une personne agissant dans l’exercice ou à l’occasion de son activité professionnelle, par une personne morale de droit public ou par un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public. » (article 16 I. A.)
Rappel du droit antérieur
Auparavant, l’action de groupe en droit du travail avait un champ restreint en ce qu’elle était limitée à deux domaines en particulier : la lutte contre la discrimination et la protection des données personnelles.
Le régime des actions de groupe était particulièrement éparse puisqu’il fallait se référer d’une part, aux dispositions communes à toutes les actions de groupe figurant dans le Code de procédure civile (840 à 841-29 du CPC), et d’autre part, aux dispositions spécifiques à la matière sociale se trouvant dans le code du travail (L1134-6 à L1134-10 du Code du travail).
Apports de la réforme
- Suppression de l’ancien régime de l’action de groupe en droit du travail – Le régime prévu aux articles L1134-6 à L1134-10 du Code du travail a été abrogé au profit d’un régime unifié de l’action de groupe applicable à toutes les matières (à l’exception des manquements en matière de santé publique).
- Champ de l’action – L’apport majeure de cette réforme réside dans l’élargissement du périmètre de l’action de groupe. En droit du travail, cette action peut désormais être engagée pour tout manquement de l’employeur à ses obligations légales ou contractuelles. (article 16 I. C.1)
- Nature du préjudice – La réforme a supprimé les restrictions relatives à la nature des préjudices réparables. Désormais, tous les types de préjudices sont susceptibles d’être indemnisés dès lors qu’ils résultent du manquement faisant l’objet du litige.
- Une action attitrée – le législateur a étendu le champ des personnes susceptibles d’intenter une action de groupe :
- Les organisations syndicales représentatives ;
- Les associations agrées à cette fin ;
- Pour les seules actions tendant à la cessation d’un manquement : les associations à but non lucratif déclarées et justifiant d’une activité effective et publique depuis au moins deux ans qui justifient de l’exercice d’une activité effective et publique de 24 mois consécutifs et dont l’objet statutaire comporte la défense d’intérêts auxquels il a été porté atteinte. (article 16 I. C.1)
- Le ministère public peut exercer, en qualité de partie principale, l’action de groupe en cessation du manquement. Il peut également intervenir, en qualité de partie jointe, dans toute action de groupe. (article 16 I. C.4)
- Procédure – La procédure se déroule en deux temps :
- Mise en demeure préalable – Le demandeur à une action de groupe en cessation d’un manquement doit préalablement à la saisine du tribunal judiciaire mettre en demeure l’employeur de faire cesser le manquement litigieux, lequel dispose ensuite d’un délai d’un mois pour en informer le CSE ainsi que les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise. A leur demande, l’employeur engage une discussion sur les mesures permettant de faire cesser le manquement.
L’action de groupe ne pourra être introduite qu’après l’expiration d’un délai de 6 mois à compter de la demande tendant à faire cesser le manquement ou à compter de la notification par l’employeur du rejet de la demande. (article 16 I. F)
- Phase contentieuse – La loi du 30 avril 2025 élargit également la finalité poursuivie par l’action de groupe. Celle-ci peut dorénavant être exercée pour obtenir :
- La cessation d’un manquement constaté
- La réparation des préjudices subis
- Cumulativement, la satisfaction de ces deux prétentions (article 16 I. A.)
- Phase contentieuse – La loi du 30 avril 2025 élargit également la finalité poursuivie par l’action de groupe. Celle-ci peut dorénavant être exercée pour obtenir :
Etant précisé que, lorsque l’action de groupe tend à la cessation d’un manquement, le demandeur n’est tenu d’établir ni un préjudice pour les membres du groupe, ni l’intention ou la négligence du défendeur. (article 16 II.)
NB : Le juge peut, au stade de la mise en état, ordonner toutes les mesures provisoires utiles pour faire cesser le manquement allégué afin de prévenir un dommage imminent ou de faire cesser un trouble manifestement illicite. Il peut également ordonner des mesures de publicité une fois la décision devenue définitive. (article 16 II.)
- Focus sur l’action de groupe tendant à la réparation d’un préjudice – Lorsque l’action de groupe tend à la réparation d’un préjudice, le législateur ouvre une option au demandeur. Il peut l’exercer soit :
- Dans le cadre d’une procédure individuelle de réparation, le demandeur présente des cas individuels au soutien de ses prétentions. (article 16 III. A.1)
- Dans le cadre d’une procédure collective de liquidation des préjudices, innovation introduite par la loi, le juge habilite le demandeur à négocier avec le défendeur pour parvenir à un accord sur l’indemnisation des préjudices subis par chacune des personnes constituant le groupe. Cette procédure est toutefois exclue pour la réparation d’un préjudice résultant d’un dommage corporel. (article 16 III. A. 2)
- Sanction de la faute dolosive ayant causé des dommages sériels – Le juge peut, à la demande du ministère public, condamner l’employeur au paiement d’une amende civile lorsque celui-ci a délibérément commis une faute en vue d’obtenir un gain ou une économie indu et que le manquement constaté a causé des dommages à plusieurs personnes physiques ou morales placées dans une situation similaire.
Le montant de la sanction est proportionné à la gravité de la faute commise et au profit que l’auteur de la faute en a retiré. Si celui-ci est une personne physique, ce montant ne peut être supérieur au double du profit réalisé. Si l’auteur est une personne morale, ce montant ne peut être supérieur au quintuple du montant du profit réalisé. (Nouvel article 1254 du Code civil)
Portée de l’action de groupe
- Suspension de la prescription – L’action de groupe, qu’elle tende à la cessation du manquement ou à la réparation des préjudices, suspend la prescription des actions individuelles en réparation des préjudices résultant des manquements constatés par le juge ou des faits retenus dans l’accord homologué. (article 16 IX. A)
NB : Est réputée non écrite toute clause ayant pour objet ou pour effet d’interdire à une personne de participer à une action de groupe. (article 16 IX. F)
- Entrée en vigueur – Le nouveau régime de l’action de groupe s’applique à toutes les actions intentées après la publication de la loi du 30 avril 2025. Les dispositions relatives à l’amende civile ne sont toutefois applicables qu’aux seules actions dont le fait générateur de la responsabilité du défendeur est postérieur à la publication de la loi. (article 16 XVII. F)
Protection sociale complémentaire
Jurisprudence – Protection sociale
Cassant un arrêt déjà rendu sur renvoi après cassation, la Haute juridiction estime que le président d’une société par actions simplifiée, assujetti par assimilation au régime général de sécurité sociale, ne peut prétendre à ce titre au service de l’indemnité conventionnelle de départ à la retraite prévue pour les salariés de la catégorie des cadres dirigeants. En conséquence, et contrairement à ce que soutient l’URSSAF, cette indemnité non versée ne doit pas être assujettie à cotisations de sécurité sociale.
Cass. 2e civ., 15 mai 2025, n° 23-13.763
Les cadeaux offerts par une société à des salariés de ses clients qui occupent des fonctions de responsables d’exploitation et de sites constituent, du simple fait de ces fonctions, une contrepartie d’une activité accomplie dans l’intérêt de la société et doivent donc être soumis à cotisations de sécurité sociale.
Cass. Soc., 15 mai 2025, n° 23-12.263
Législation et réglementation
Le BOSS s’est doté d’une table des paramètres qui reprend l’ensemble des données paramétriques en vigueur et publiées dans ses rubriques. Un document au format CSV permet d’accéder aux données des quatre dernières années.
La CNAM a mis fin à la tolérance qui consistait à indemniser les jours d’arrêt de travail non prescrits en cas de prolongation. Depuis le 1er septembre 2024, toute période non couverte par une prescription médicale entre deux arrêts de travail, peu important sa durée, n’est plus indemnisée.
Le décret supprime la condition préalable d’adressage par les médecins, les sages femmes et les professionnels de santé de la médecine scolaire en vue de la prise en charge des séances d’accompagnement réalisées par un psychologue et augmente de huit à douze le nombre de séances pouvant être prises en charge annuellement.
L’APEC a délivré de nouveaux agréments permettant d’intégrer des catégories de salariés non-cadres à la catégorie des cadres en application de l’article R.242-1-1 du code de la sécurité sociale pour les branches d’activité suivantes :
- Exploitation cinématographique ;
- Industrie de la fabrication des ciments ;
- Pompes funèbres ;
- Travail des cadres, techniciens et employés de la publicité française.
Dans le cadre d’une souscription dématérialisée par voie électronique, l’absence de remise des documents contractuels sur un support durable entraîne une prorogation du droit de renonciation de l’assuré.
Selon le médiateur, la mise à disposition des documents contractuels via un lien communiqué par SMS qui ne renvoie pas vers un espace sécurisé ne peut être considérée comme une remise des documents sur un support durable.